Quelle est la valeur de quelque chose dont nous ne pouvons nous passer?
Plus de 13% du Produit intérieur brut (PIB) du Canada dépend directement des écosystèmes en santé, selon une note de réunion interne d’Environnement Canada obtenue par Postmedia News. Par contraste, le projet économique de prédilection du gouvernement Harper, les sables bitumineux de l’Alberta, représente un simple 2%. Mais est-ce que 13% est une estimation raisonnable de la « valeur » de la nature? Considérant la perspective actuelle qui place l’économie au-dessus de tout, il est important de trouver des façons d’inclure la valeur de la nature dans nos calculs afin qu’elle ne soit pas mise de côté lors de décisions importantes. D’un autre côté, il semble absurde d’essayer d’attribuer une valeur à une chose tellement vitale que nous ne pourrions vivre sans elle.
La plupart des habitants sur cette planète sont désormais des citadins et passent de moins en moins de temps dehors. En tant que tel, nous assumons que nous pouvons nous créer un habitat. Du moment que nous avons accès à des parcs dans lesquels jouer, nous ne pensons pas beaucoup à la nature. Faisons donc un petit exercice de pensée.
Imaginons que des scientifiques inventent une machine à voyager dans le temps qui nous permet de remonter 4 milliards d’années dans le passé, avant que la vie n’apparaisse. Nous nous sanglons, appuyons sur le bouton et nous sommes transportés à une époque durant laquelle la planète était stérile, dépourvue de vie. Nous ouvrons l’écoutille et nous nous aventurons à l’extérieur. Et, nous mourrons pratiquement sur le champ! Ceci est dû au fait que avant que la vie n’apparaisse, l’atmosphère de la Terre était toxique pour des animaux comme nous — riche en CO2, ammoniaque, souffre et vapeur d’eau, mais dépourvue d’oxygène.
L’oxygène est un élément hautement réactif qui est rapidement consommé quand des éléments comme le souffre ou le fer s’oxydent. Ce n’est qu’après que la vie ait évolué afin d’exploiter la lumière du soleil par le processus de la photosynthèse que le dioxyde de carbone fut absorbé et que l’oxygène fut libéré comme sous-produit. Pendant des millions d’années, la photosynthèse a libéré de l’oxygène, ce dernier s’accumulant dans l’atmosphère pour en représenter 20%. À ce jour, tout ce qui est vert sur la terre ferme et dans les océans permet de maintenir l’équilibre entre l’oxygène et le dioxyde de carbone.
Cependant, depuis la révolution industrielle, nous brûlons des énergies fossiles, libérant plus de dioxyde de carbone que la vie ne peut en absorber. Il s’accumule dans l’atmosphère et dans les océans, et c’est ce qui cause le réchauffement climatique.
Revenons à notre expérience. Nous savions que l’atmosphère était toxique avant de partir et nous avons donc emporté avec nous des casques et des réservoirs d’air comprimé, que nous avons enfilés avant de sortir. Nous sortons et errons, observant l’étrangeté des paysages arides pendant une heure ou deux avant de commencer à avoir soif. Il y a de l’eau, mais à quoi pouvons-nous nous fier pour boire? La vie fait partie du cycle hydrologique qui fait circuler l’eau autour de la Terre à travers les rivières, les lacs, les océans et l’atmosphère. Les organismes du sol tels que les champignons et les bactéries, ou encore les plantes racinaires, filtrent les molécules présentes dans l’eau et la rendent potable.
Nous avions également prévu l’éventualité de manquer d’eau alors nous avons attaché des bouteilles d’eau à nos casques et nous les avons équipés de pailles pour boire. Après plusieurs heures, nous commençons à avoir faim. Cependant, avant que la vie n’apparaisse sur la Terre, il n’y avait pas de nourriture pour des animaux comme nous parce que tout ce que nous mangeons fut un jour vivant! Nous consommons des carcasses d’animaux et des plantes et nous absorbons leurs molécules afin de contribuer au maintien de chaque partie de notre corps.
Nous avions également anticipé ce fait et nous avons prévu de la nourriture. En fait, j’avais prévu de rester un peu et d’amener des graines afin de les faire pousser mais comment aurais-je pu le faire? Bien qu’il y ait de la poussière, du sable, des pierres et de l’argile, il n’y a pas de sols parce que ceux-ci se forment par l’accumulation des molécules issues des restes des plantes et des animaux.
Finalement, le soleil se couche et bien qu’il fasse chaud à cause de l’effet de serre, nous décidons de démarrer un feu afin de nous asseoir autour et d’échanger des histoires. Où pourrions-nous trouver des choses à brûler? Le bois, la tourbe, le fumier, le charbon, le pétrole et le gaz ont tous emmagasiné l’énergie du soleil comme produits de la photosynthèse que nous brûlons par la suite afin de générer du feu. Avant la vie, il n’y avait pas de carburant. Encore une fois, par anticipation, nous avons pensé à amener des bûches, du bois d’allumage et du papier et nous les préparons pour allumer le feu. Malheureusement, un feu requiert de l’oxygène, ce qui fait que rien ne se passe quand nous craquons l’allumette.
Le but de cet exercice est d’illustrer le fait que les fondements de nos vies — l’air, l’eau, la photosynthèse, le sol et la nourriture — sont rendus possibles par la chaîne de la vie qui a évolué sur une planète autrefois stérile. Les organismes vivants sur la terre et dans les océans — incluant nous — créent, purifient et régénèrent ces éléments vitaux. Qui a besoin de la nature? Nous. Sans la nature, nous n’existerions pas. Comment pouvons-nous donner une valeur économique à cela?
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